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« Oncle Robert » par Dominique PATUREL

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à l’Hôtel Dubocage de Bléville le 5 octobre 2012

 

Les 5 et 7 octobre 2012, Dominique PATUREL, né au Havre, comédien de grand talent, et petit-neveu de Robert le MINIHY de la VILLEHERVE, vient au Havre lire des passages de la poésie et de la prose de son oncle, que la Société Havraise d’Etudes Diverses s’enorgueillit d’avoir eu pour membre.

Né à Ingouville le 15 novembre 1869, Robert de la Villehervé voue une grande passion aux Lettres. Il devient membre de la SHED en 1896 et y sera très actif. Nombreux sont les articles, poésies, pièces de théâtre même, qu’il donne à entendre à ses collègues. C’est pourquoi, pour en honorer la mémoire, le président de la SHED Gustave BUCHARD prononce en novembre 1933 une allocution devant le buste de Robert de la Villehervé érigé dans le jardin Saint-Roch :

« Devant ce buste du maître Verlet, qui a reproduit les traits de notre ami avec une exactitude si saisissante dans son expression, nous déposons ces fleurs, pour obéir à un respect toujours profondément ressenti pour le beau talent de notre concitoyen.

Je le revois donnant des conférences de littérature à l’Hôtel de Ville devant un nombreux public, surtout féminin, ou avec les membres de la commission du concours Foloppe [organisé par la SHED], discutant parfois véhémentement sur les mérites des candidats. Pour enlever un vote favorable, il déclama de sa voix prenante, modulée, chantante, aidée d’une diction parfaite, un poème qui avait échappé aux éloges de la Commission. Les juges, charmés, étonnés, subjugués, retournés, lui donnèrent leurs voix, et le poète victorieux arbora, une fois de plus, son sourire sarcastique.

Ah ! Certes, la discussion n’était pas toujours aisée avec Robert de la Villehervé ;   il n’admettait la contradiction que difficilement. Ne combattait-il pas pour ses idées, ses opinions, pour cette poésie qu’il aimait passionnément et qui le possédait jusqu’aux moelles ?

Mesdames, Messieurs, la Société Havraise d’Etudes Diverses vous remercie vivement d’avoir bien voulu témoigner à notre grand poète havrais, vos sentiments de reconnaissance pour avoir jeté un peu de gloire sur notre Compagnie, sur notre Cité, sur notre Pays ».

Robert de la Villehervé est mort au Havre le 14 août 1919.

 

Dominique Paturel rappelle tout d’abord l’origine du nom exact de son grand oncle : Robert Le Minihy de la Villehervé. Minihy désigne en Bretagne un lieu où les gens en difficulté pouvaient trouver refuge. Il cite la devise de la famille « A tous refuge ».

Le père de Robert était avocat, c’est chez lui que René Coty, tout jeune, vint faire un stage. Il le rappela à Dominique Paturel beaucoup plus tard, lui disant combien il en gardait un souvenir ému.

 

Robert n’était intéressé que par la littérature et la poésie, son maître était Théodore de Banville, avec lequel il entretenait une correspondance suivie, malheureusement disparue dans les bombardements de 1944. Néanmoins, sa femme, Tante Charlotte, parvint à réunir et faire éditer toutes ses oeuvres qui sont conservées à la Bibliothèque municipale du Havre.

La vie de Robert de la Villehervé fut traversée par deux drames : la tentative d’assassinat par un valet de ferme dans sa maison de campagne, dont il réchappa non sans de graves blessures, mais surtout la mort à l’age de 18 ans de son unique fils, Bertrand, auquel il était attaché de manière fusionnelle.

Après avoir évoqué quelques souvenirs familiaux poignants, Dominique Paturel entame les lectures, de poèmes d’abord, qu’il a « choisis avec son cœur », car l’œuvre d’Oncle Robert est vaste, allant du virelet à la grande ode historique. Les femmes l’ont inspiré, de Camille, à Anne-Marie, la mère de Dominique Paturel, en passant par les savoureuses Demoiselles de Bolbec, ou les Jeunes filles au bord de la mer (poème dédié à Puvis de Chavannes), ou encore Les trois filles du juge de paix, Jeanne, Amandine, Clémence, qui, malgré les promenades répétées en compagnie de leur père ne trouveront jamais de mari… La tendresse, l’humour, le sarcasme règnent dans ces poèmes.

Dominique Paturel rappelle que son grand oncle a été le fondateur de la Société Linnéenne, toujours active de nos jours. Le poète était aussi naturaliste.

Parmi les romans, dont l’un, Les folies de Cardillac, ne comprend pas moins de six cents pages, Dominique Paturel lit ensuite des passages de deux œuvres : Le Gars Perrier, peinture de la vie paysanne, dure, rugueuse, et du rejet du père envers son dernier fils, né le jour de la mort de son frère aîné, ainsi que du combat jusqu’à la mort de la mère pour faire vivre son petit.

Viennent ensuite des passages des Impressions de l’assassiné. Le 12 septembre 1893, Robert, alors dans sa maison La Greffière, fut agressé par un jeune homme qui lui avait été recommandé par un voisin, pour s’occuper de ses bêtes et de son jardin, sans lui faire part des antécédents plus que douteux de celui-ci. Un soir, le jeune homme ayant été congédié, l’écrivain ne voyant pas revenir la bonne sortie donner à manger à la vache, sortit à son tour pour l’appeler, quand il fut assailli et frappé à dix huit reprises de coups de couteaux, dont l’un dans le crâne où la lame se brisa, y laissant quatre centimètres et deux millimètres de fer. L’agresseur lâcha prise, Robert réussissant à le mordre à une main, marque indélébile qui prouvera le forfait. Mais la bonne avait été assassinée aussi, ce qui valut la peine de mort à ce triste personnage.

Entre l’écriture, le style, de Robert de la Villehervé et le talent de lecteur et d’acteur de Dominique Paturel, les spectateurs sont passés par toutes les émotions, jusqu’aux larmes à la fin.

Après les chaleureux applaudissements du public, et les remerciements de Mme Chantal Ernoult, adjointe au Maire chargée des affaires culturelles, notamment à la famille de Dominique Paturel, à Mme Leprêtre, organisatrice de l’exposition au Musée Dubocage, à Dominique Rouet, conservateur à la bibliothèque municipale, les spectateurs se sont pressés en foule autour de Dominique Paturel pour lui exprimer leur gratitude, leur admiration.  Les uns lui ont rappelé des souvenirs sur sa carrière, et M. Castel, actuel président de la Société Linnéenne, lui a remis des documents manuscrits écrits de la main de son Oncle Robert.

–> Le Havre infos du 3 octobre 2012 : Dominique Paturel lit Oncle Robert